- Manière de diriger les yeux vers quelque chose afin de voir.
- Expression des yeux, quant aux sentiments, aux états d’âme de la personne qui regarde.
Exemples : regard doux, d’approbation, regard tendre, amoureux, timide, regard fier, sombre, menaçant, foudroyant.
On comprend tout de suite l’importance du regard dans la relation avec autrui. Un regard d’approbation et de fierté pousse un individu à se surpasser par contre si quelqu’un nous regarde de travers, le doute s’installe, on se questionne, l’estime de soi n’est plus la même.
Lorsque l’on est en contact avec des enfants, ce regard est d’autant plus important.
Il est bon de se rappeler le premier regard celui que l’on porte à son enfant à la naissance, ce regard si intense, émouvant, bienveillant, un regard tellement important pour l’épanouissement de la maman et de son nouveau-né. Puis, plus tard, le regard que l’on pose sur son enfant pour chacune de ses grandes réussites : premier sourire, premiers mots, premiers pas…un regard plein d’encouragement, d’émerveillement, qui lui permet de faire des efforts exceptionnels.
Pourquoi ce regard change- t-il au fil du temps, quand par exemple un enfant rencontre des difficultés et qu’il ne correspond plus à un idéal, à un « standard ».
Pourtant, les enfants différents, plus que les autres, sont sensibles au regard que l’on porte sur eux.
« Ce que la voix peut cacher, le regard le livre » Georges Bernanos
L’orthophoniste de Léo m’expliquait qu’elle se faisait souvent « violence » pour garder ce regard de confiance et de positivisme auquel elle tient tant. Lors d’une séance de tests avec Léo, il avait démarré totalement de travers et elle aurait très bien pu se dire « bon on laisse tomber là, on passe à autre chose, c’est trop compliqué pour lui » mais elle a persévéré, a continué à l’encourager et bizarrement quand la tâche est devenue plus complexe, c’est là que Léo a été le plus performant.
Tous les enseignants devraient se « faire violence » ! autrement dit : voir l’élève sous un angle positif, vouloir sa réussite, espérer sans cesse le meilleur tout en acceptant le pire, avoir confiance en cet élève.
Pourquoi ?
- parce que sans estime de soi, il ne peut y avoir de projet d’apprentissage de l’élève
- parce que la confiance en soi est sérieusement endommagée si l’élève ressent que l’adulte ne lui fait pas confiance.
« C’est notre regard qui enferme souvent les autres dans leurs plus étroites appartenances, et c’est notre regard aussi qui peut les libérer » Amin Maalouf
Malgré tout, l’enfant en difficulté ou en échec scolaire est troublant pour l’enseignant.
Pourquoi ce qui marche avec les autres élèves ne fonctionne pas sur lui ? Pourquoi cet élève n’arrive pas à se concentrer, semble peu motivé, n’arrête pas de bouger ? Qu’est-ce qui l’empêche d’apprendre ?
Il faut se questionner sans cesse avec les enfants dys-fférents et toujours chercher à comprendre pourquoi il donne telle ou telle réponse, car cette réponse n’est ni fausse ni juste, elle correspond simplement à sa vision des choses, une vision certes plus complexe…
L’enseignant, le plus souvent en échec devant ces enfants, peut être amené à penser qu’il faut minimiser les exigences scolaires puisque cet élève cumulant les handicaps : « Il est logique qu’il échoue » et « il est humain de le laisser tranquille », or laisser un élève tranquille c’est tout simplement l’abandonner et donc contribuer à son échec.
C’est en lisant l’excellent livre « Apprendre autrement avec la pédagogie positive » d’Audrey Akoun et Isabelle Pailleau que j’ai découvert « l’effet pygmalion ».
L’effet pygmalion : késako ?
C’est la mise en conformité des comportements d’une personne avec les attentes à son égard. Autrement dit, « je pense donc tu es » et en croyant qu’une chose est vraie, on peut la rendre réelle ! Non vous ne rêvez pas !
Si un élève est étiqueté d’ « élève en difficultés » et si je crois qu’il est logique que cet élève échoue, il est fort probable que cet élève ne réussisse pas. Si au contraire, je porte un regard positif sur cet enfant et que je crois en lui, cet élève sera capable d’accomplir des progrès fulgurants.
C’est en tout cas ce que révèlent les travaux de R. Rosenthal et L. Jacobson avec l’expérience suivante :
« Ils choisissent, pour leur expérience, un quartier pauvre, délaissé par les politiques et où habite un nombre important de familles immigrées vivant dans des conditions très difficiles. Ils se présentent dans une école de ce quartier et prétendent qu’ils dirigent une vaste étude à Harvard sur l’éclosion tardive des élèves. Rosenthal et Jacobson font passer un test de QI à l’ensemble des élèves, puis s’arrangent pour que les enseignants prennent connaissance des résultats qu’ils ont préalablement tronqués (20% des élèves se sont vus attribuer un résultat surévalué). A la fin de l’année, Rosenthal et Jacobson font repasser le test de QI aux élèves. Le résultat de l’expérience démontre qu’une année après le premier test, les 20% des élèves aux résultats surévalués…ont amélioré de 5 à plus de 25 points leurs performances au test d’intelligence. Et ce, grâce au regard qu’ont pu porter les enseignants sur eux. » (Extrait de Apprendre autrement avec la pédagogie positive, Audrey Akoun et Isabelle Pailleau)
Bien sûr il existe des détracteurs de l' »effet pygmalion » mais personnellement je l’ai constaté pour mon fils et dans un tout autre domaine que l’école, le sport.
Mon fils Léo, dyspraxique, est un passionné de foot, depuis tout petit il a un ballon dans les pieds et pourtant avec sa dyspraxie nous étions loin de nous douter qu’il puisse pratiquer ce sport. Malgré tout, aux yeux de son père, un ancien footballeur passionné, il était loin d’être aussi bon que les autres. Depuis tout petit, Léo a une façon particulière de jouer, il se démarque. Vous allez me dire logique ? Et bien non, puisque à 6 ans, généralement que font les enfants ? Ils se jettent TOUS sur le ballon, tous sauf Léo, lui il attendait qu’on lui fasse une passe. Et il a attendu, longtemps, j’ai même entendu dire « il ramasse des pâquerettes » (no comment !). Alors voilà il a passé quelques années à attendre des passes qu’on ne lui a jamais faites et il s’en plaignait « on ne me fait jamais de passe », « les enfants sont perso ils courent seuls avec le ballon pour aller marquer des buts ». Dans son équipe, il était bien évidemment en retrait. Ma mère et moi nous nous disions qu’il avait tout simplement déjà compris comment on devait jouer mais que ça ne lui servirait que plus tard. Son père riait en pensant que nous n’y connaissions rien au foot. Cette année nous avons changé de club et depuis c’est la révélation. Pourquoi ? Parce que son père a tout simplement changé de regard et a vu le potentiel de son fils grâce à ses démarcations. Je me rappelle d’une veille de match où il proposa à Léo de l’entraîner et de lui apprendre quelques techniques. Vous auriez vu la capacité avec laquelle Léo a réussi ses exercices ! Son père n’en revenait pas et il me disait « viens voir, il est trop fort », ce regard de fierté qui pousse tout simplement Léo à se surpasser. Et ça a marché, premier match de la saison, je reçois un premier sms de mon mari disant : « Incroyable Léo c’est le meilleur !!! » et quelques secondes plus tard « But de Léo !!!! » et je lui ai bien sûr répondu : « Yesss ! c’est ton regard qui le pousse à faire de son mieux ». Aujourd’hui Léo joue attaquant et son père est fier de lui.
En allant chercher Léo au foot un soir de cette semaine, j’ai écouté avec attention une chanson très connue, je vous laisse méditer les paroles….
Ne me dites pas que ce garçon était fou
Il ne vivait pas comme les autres, c’est tout
Et pour quelles raisons étranges
Les gens qui n’sont pas comme nous,
Ça nous dérange
Ne me dites pas que ce garçon n’valait rien
Il avait choisi un autre chemin
Et pour quelles raisons étranges
Les gens qui pensent autrement
Ça nous dérange
Ça nous dérange !